NUTRITION
Carte mentale
Élargissez votre recherche dans Universalis
Nutrition végétale
Nature des besoins
Jusqu'au milieu du xviie siècle, notamment sous l'influence du physiologiste italien Andrea Cesalpino (1583), on continuait d'adopter les théories d'Aristote selon lesquelles les plantes recevaient du sol une nourriture tout élaborée : l'humus. Sans doute, dès 1563, un précurseur de génie, Bernard Palissy, avait eu une notion tout à fait claire du rôle des sels minéraux dans la vie végétale, mais ses idées, appuyées pourtant sur des remarques de bon sens, n'eurent aucune influence sur ses contemporains.
Il fallut attendre le xixe siècle pour qu'on puisse recueillir, à la suite des travaux de Lavoisier, les données analytiques qui montrèrent l'importance des prélèvements minéraux opérés par la plante (Théodore de Saussure, 1804).
J. von Liebig, en 1840, ruinant définitivement la théorie de l'humus, établit le caractère exclusivement minéral de l'alimentation des végétaux supérieurs, sous réserve qu'il s'agisse d'autotrophes ; toutefois, les végétaux non chlorophylliens (champignons), qui sont hétérotrophes, consomment la matière organique fournie en particulier par l'humus, ce qui laisse encore quelque valeur à la théorie d'Aristote.
Le chimiste allemand Justus Liebig (1803-1873). Il découvrit le chloroforme.
Crédits : Hulton Archive/ Getty Images
À partir de 1850, et notamment de 1850 à 1870, de nombreux auteurs réussirent à mettre au point des formules de solutions nutritives permettant la survie des végétaux supérieurs sans le moindre apport de matières organiques (J. Sachs, J. Knop, J.-B. Boussingault, G. Ville) et celle des champignons par l'apport de glucides (J. Raulin), comme indiqué dans le tableau 3.
La composition de ces solutions traduit le fait que, chez les végétaux chlorophylliens, exception faite de la nutrition carbonée assurée par le gaz carbonique et de la consommation d'eau inhérente à la photosynthèse (cf. photosynthèse) , les végétaux absorbent d'autres éléments minéraux en quantité variable. Les macroéléments (azote, potassium, calcium, magnésium, soufre et phosphore) sont ceux qui sont fournis à des doses de l'ordre de 10–4 à 10–3 g/ml, alors que les microéléments (ou oligoéléments) ne sont nécessaires qu'à des doses beaucoup plus faibles, de l'ordre de 10–8 à 10–6 g/ml (parfois 10–5, le fer par exemple), avec comme cas extrême le molybdène, pour lequel la dose optimale est de 10–10 g/ml, c'est-à-dire un dixième de microgramme par litre.
Macroéléments
L'azote
L'azote présente pour une plante, comme pour tout organisme, une importance primordiale (cf. azote). C'est l'un des principaux constituants des protéines, qui caractérisent la matière vivante. La carence en azote, ou « faim d'azote », se traduit par une chlorose (feuillage vert jaunâtre), avec apparition de taches colorées produites par des pigments anthocyaniques ; le phénomène est favorisé par une élévation, dans les tissus végétaux, du rapport C/N (excès des glucides par rapport aux aminoacides). Les troubles nutritifs sont rapidement mortels.
L'azote de l'air, en grande abondance pourtant, n'est pas utilisé directement par les plantes. Cependant, diverses bactéries du sol fixatrices d'azote sont capables d'enrichir ainsi le sol en nitrates. De plus, certains végétaux, appartenant surtout à la famille des Légumineuses (pois, lentille, luzerne, etc.), possèdent dans leurs racines des bactéries symbiotiques, qui sont elles aussi capables de réduire l'azote de l'air et de le transformer en composés aminés (NH3 ou amino-acides) ensuite utilisés par la plante qui héberge ces symbiotes. La fixation d'azote atmosphérique ainsi réalisée par les Légumineuses est très importante : alors que les cultures « exportent » environ 80 kg d'azote par hectare et par an, une culture de légumineuses bien conduite apporte au sol plus de 200 kg d'azote par hectare et par an ; c'est pourquoi on emploie ces plantes (engrais vert) dans les assolements (rotation des cultures) pour enrichir le sol en azote.
L'azote organique, surtout les petites molécules (aminoacides, [...]
1
2
3
4
5
…
pour nos abonnés,
l’article se compose de 21 pages
Écrit par :
- René HELLER : professeur honoraire de physiologie végétale à l'université de Paris-VII, membre de l'Académie d'agriculture
- Raymond JACQUOT : directeur d'institut au C.N.R.S.
- Alexis MOYSE : professeur honoraire à l'université de Paris-Sud, correspondant de l'Académie des sciences
- Marc PASCAUD : docteur ès sciences, professeur honoraire à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie
Classification
Autres références
« NUTRITION » est également traité dans :
NUTRITION AZOTÉE DES VÉGÉTAUX
En recherchant si les plantes pouvaient absorber l'azote de l'air, Jean-Baptiste Boussingault (1802-1887), le « père de l'agronomie », posait la dernière question concernant l'alimentation exclusivement minérale des végétaux su […] Lire la suite
ABSORPTION VÉGÉTALE
Les plantes, pour la plupart, tirent du sol l'eau et les sels minéraux qui leur sont nécessaires. Les racines – qui forment l'appareil radiculaire – et les poils absorbants localisés sur les plus jeunes d'entre elles, jouent pour cela un rôle essentiel. En effet, elles absorbent les éléments minéraux sous forme d'ions, soit à partir de la solution du sol, qu'ils soient libres ou piégés dans des […] Lire la suite
AGRONOMIE
Dans le chapitre « Aspect chimique des problèmes » : […] C'est à Justus von Liebig que l'on doit d'avoir, en 1840, donné son essor à l'idée de Théodore de Saussure qui montre, dans ses Recherches chimiques sur la végétation (1804), que les plantes peuvent se nourrir de matières minérales. L'alimentation carbonée s'effectue à partir du gaz carbonique de l'air, l'énergie est fournie par la lumière et cette synthèse se réalise grâce à l'action de la ch […] Lire la suite
ALCOOLISME
Dans le chapitre « Aspects biologiques » : […] Le degré alcoolique mesure le pourcentage en volume d'alcool d'une boisson. Ainsi dans un litre de vin à 12 degrés, il y a 12 p. 100 d'alcool pur soit 0,12 litre ou 0,12× 0,8 = 96 g d'alcool, 0,8 étant la densité de celui-ci. À des doses inférieures à 2 g/kg/24 h sur l'animal sain normalement nourri et non accoutumé, l'éthanol est oxydé préférentiellement à une vitesse constante et limitée : 100 […] Lire la suite
ALIMENTATION (Aliments) - Prise alimentaire
L' animal, comme l'homme, assure sa croissance et, en fonction du programme génétique de l'espèce, atteint à l'âge adulte une dimension et un poids corporel qui demeurent approximativement stables. Sa composition corporelle, en particulier la proportion en eau et en graisses, est identique chez tous les individus de l'espèce et constante chez l'adulte. Ces constantes impliquent l'existence d'une […] Lire la suite
ANIMAUX MODES D'ALIMENTATION DES
La diversité des modalités alimentaires que l'on rencontre chez les animaux est bien illustrée par la coexistence de deux terminologies parallèles, l'une latine (-vore de vorare ) et l'autre grecque (-phage, de phagein ), qui définissent leurs comportements alimentaires. Un troisième suffixe, -trophe (du grec trophê , nourriture), a un sens plus général relatif à la nutrition et s'applique à l'en […] Lire la suite
AUTOTROPHIE & HÉTÉROTROPHIE
Les besoins d'aliments et d'énergie sont satisfaits de manière différente selon les êtres vivants. Un végétal chlorophyllien fabrique son protoplasme en utilisant des sels minéraux, du gaz carbonique, de l'eau et de la lumière. L'homme et les animaux n'ont pas cette capacité, leur autonomie nutritive n'est pas aussi grande, puisqu'ils exigent des aliments organiques. Leur mode de vie est hétérot […] Lire la suite
AVITAMINOSES
C’est en 1897 qu’un médecin hollandais, C. Eijkman a fait disparaître, à Java, chez les consommateurs de riz poli (dépourvu de l’enveloppe du grain), un syndrome neurologique appelé béri-béri, en introduisant dans leur alimentation du son de riz. Il avait préalablement guéri de même des pigeons nourris eux aussi de riz poli. Le son de riz contenait donc un facteur nutritionnel sans lequel apparais […] Lire la suite
BACTÉRIES
Dans le chapitre « Physiologie des populations bactériennes » : […] Les cellules bactériennes sont capables de se multiplier dans des milieux de culture liquides ou sur milieux solides artificiels, dans des conditions physico-chimiques approchant les conditions de leur écosystème naturel. Cependant, certaines espèces bactériennes ne sont pas cultivables sur milieux artificiels ; c'est le cas de Mycobacterium leprae , agent de la lèpre, ou de Treponema pallidum , a […] Lire la suite
BACTÉRIOLOGIE
Dans le chapitre « Panorama du métabolisme bactérien » : […] À l'échelle chimique, même les plus petites cellules sont incroyablement compliquées. La plupart des chercheurs qui s'intéressent aux caractéristiques essentielles de la croissance et de la division cellulaires portent leur attention sur les bactéries. La bactérie la plus communément utilisée en bactériologie expérimentale, Escherichia coli , pèse environ 2 × 10 —12 gramme (10 12 daltons), poids […] Lire la suite
Voir aussi
- ALCALINO-TERREUX
- AMMONIAC biochimie
- MOLÉCULE ANTAGONISTE
- AUXOTROPHES
- AZOTE ORGANIQUE
- BORATES
- CALCIUM & MÉTABOLISME CELLULAIRE
- CHLOROSE
- FACTEUR LIMITANT écologie
- MÉTABOLISME DU FER
- KINASES
- MAGNÉSIUM biologie
- MÉTABOLISME AZOTÉ
- NITRATE RÉDUCTASE
- NITRATES
- OXYDORÉDUCTIONS biologie
- PHOSPHATES
- PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE ou PHYTOBIOLOGIE
- POTASSIUM biologie
- SELS MINÉRAUX
Pour citer l’article
René HELLER, Raymond JACQUOT, Alexis MOYSE, Marc PASCAUD, « NUTRITION », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 09 mai 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/nutrition/