MITOCHONDRIES
Carte mentale
Élargissez votre recherche dans Universalis
La continuité mitochondriale
Les mitochondries se reproduisent-elles par croissance et division ou bien par synthèse de novo ? On sait maintenant qu'elles se reproduisent par croissance de cet organite par suite de la synthèse coordonnée de ses constituants moléculaires. À partir d'un certain volume mitochondrial, il y a coupure de la membrane interne, formation de deux vésicules matricielles et segmentation de la membrane externe qui clôt et sépare les deux vésicules précédemment formées. La masse mitochondriale double à chaque mitose.
Cette continuité physique des mitochondries a été tout d'abord démontrée avec les phospholipides des membranes. Des mutants de Neurospora crassa, auxotrophes pour la choline indispensable à la synthèse de phosphatidylcholine, ont des mitochondries plus denses quand les cellules sont cultivées en absence de choline. L'addition de choline ne s'accompagne pas de la synthèse d'une nouvelle population de mitochondries moins dense, mais de la diminution progressive de densité de la population initiale des organelles. La continuité de la biogenèse des protéines se manifeste aussi par la transformation des promitochondries des levures cultivées en anaérobiose en mitochondries effectives, à la suite de l'addition d'oxygène dans le système de culture des levures.
La biogenèse des mitochondries est un phénomène complexe mettant en jeu le génome nucléaire et le génome propre à la mitochondrie. La coordination de leur activité ne met pas en cause cependant l'autonomie fonctionnelle de ce dernier, comme le prouvent les observations qui précèdent. C'est pourquoi il est possible de postuler l'existence d'une continuité génétique mitochondriale propre à chaque espèce. Les différences génomiques mitochondriales pourraient alors servir à analyser les relations évolutives entre espèces voisines pour reconstituer leur hypothétique phylogenèse (comme on s'est efforcé de le faire en paléoanthropologie avec la théorie de l'« Ève africaine »).
Le génome mitochondrial : structure et fonction
Toutes les mitochondries ont leur propre génome : il ne comporte – comme celui des Procaryotes, auxquels les mitochondries sont peut-être apparentées (selon la théorie dite symbiotique de l'origine des cellules encaryotes) – que de l'ADN bicaténaire, circulaire, sauf exception où il est linéaire. Toutes les séquences sont identiques pour un même organisme.
Structure
La taille de ces molécules d'ADN est relativement uniforme dans le règne animal et est caractéristique de l'espèce : 16 569 paires de bases pour l'ADN mitochondrial humain, 17 400 pour Xenopus laevis, de 15 700 à 19 500 pour la Drosophile. L'ADN mitochondrial de levures a environ 75 000 paires de bases. Le génome mitochondrial des plantes peut être de 20 à 30 fois plus grand que le génome de levure. Il comporte, comme celui des levures, des gènes dispersés dans des zones non codantes riches en adénine et thymine ou guanine et cytosine.
La séquence complète du génome mitochondrial humain a été publiée (Nature, avr. 1981). L'organisation de ce génome est tout à fait remarquable (fig. 13). Les gènes codant pour les 2 ARN ribosomaux, 22 ARN de transfert et 13 protéines sont tellement serrés qu'il n'y a pratiquement pas de bases non codantes entre eux. Quelques codons ne sont pas conformes au code génétique universel : UGA, qui est un codon d'arrêt dans la synthèse qui s'accomplit dans les ribosomes cytoplasmiques, code pour le tryptophane dans les mitochondries ; AGA et AGG, qui codent habituellement pour l'arginine, sont des codons d'arrêt dans les mitochondries.
Les mutants mitochondriaux de levures
Vers les années 1946-1948, Boris Ephrussi observait qu'une culture de levure diploïde ou haploïde donne après repiquage, dans les quelques jours qui suivent, une colonie identique aux cellules mères sauf, dans quelques cas, 1 à 2 p. 100 de cellules plus petites. Les mutants « petite colonie » ne donnent que des petites colonies. La mutation est irréversible. Le traitement des cellules de la souche sauvage par l'acriflavine fait passer le taux de mutation de 1-2 p. 100 à 100 p. 100. Ces mutants poussent lentement car ils ne peuvent respirer, leur métabolisme est uniquement fermentaire, ils ont perdu la capacité de synthétiser un certain nombre d'enzymes respiratoires, dont la [...]
1
2
3
4
5
…
pour nos abonnés,
l’article se compose de 17 pages
Écrit par :
- Roger DURAND : professeur de biochimie à l'université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand
Classification
Autres références
« MITOCHONDRIES » est également traité dans :
AÉROBIOSE & ANAÉROBIOSE
Dans le chapitre « Régulation du métabolisme de l'oxygène » : […] Pasteur avait montré que les levures consomment moins de glucose en aérobiose qu'en anaérobiose. Ce fait, connu sous le nom d' effet Pasteur , se retrouve chez tous les organismes anaérobies facultatifs. Quelles que soient les conditions d'aération, la consommation d'énergie pour assurer les besoins vitaux est la même. La dégradation totale d'une molécule de glucose selon la réaction : libère 680 […] Lire la suite
BIOSYNTHÈSE DE L'ATP
La théorie émise par Peter Mitchell (1920-1992), qu'il baptisa théorie chimiosmotique, bouleversa la bioénergétique. Jusqu'alors, on considérait que l'oxydation des substrats respiratoires dans les mitochondries était couplée avec la synthèse endergonique (consommatrice d'énergie) d'ATP (adénosine triphosphate) par phosphorylation de l'ADP : ADP (adénosine diphosphate) + phosphate + énergie → ATP. […] Lire la suite
CELLULE - L'organisation
Dans le chapitre « Conversions d'énergie par la cellule » : […] Les cellules ont besoin d'énergie pour leurs différentes activités : biosynthèse de molécules, production de mouvements, transports actifs ; cette énergie est fournie par l'hydrolyse de molécules d' adénosine-triphosphate (ATP) en adénosine diphosphate (ADP) et phosphate inorganique. Dans ces conditions les travaux cellulaires ne peuvent se poursuivre que si les molécules d'ATP consommées sont r […] Lire la suite
CELLULE - La division
Dans le chapitre « La réplication de l'ADN » : […] La réplication de l'ADN chez les eucaryotes suit les mêmes mécanismes de base que ceux qui sont décrits chez les bactéries. Cette réplication est en particulier semi-conservative et bidirectionnelle. Le problème de la duplication des chromosomes d'eucaryotes est cependant compliqué par la structure de la chromatine et par la quantité d'ADN à répliquer qui est de plusieurs centaines de fois supéri […] Lire la suite
EPHRUSSI BORIS (1901-1979)
Né à Moscou le 9 mai 1901, Boris Ephrussi a fait ses études supérieures à la faculté des sciences de Paris où, en 1946, sera créée à son intention la première chaire de génétique. Il fut, avec Philippe L’Héritier, Georges Teissier et Georges Rizet, l’un des principaux artisans de la renaissance de la génétique en France après 1935 et de son développement dans les universités françaises. Au sein […] Lire la suite
GÉNÉTIQUE
Dans le chapitre « Hérédité des organites à fonction bioénergétique » : […] Les mitochondries sont des organites régulièrement rencontrés dans le cytoplasme des cellules des Eucaryotes. Leur forme extérieure est variable, mais leur structure fine révélée par le microscope électronique est très constante. Ces organites sont le siège des réactions du catabolisme respiratoire. Celui-ci, la plus répandue des voies utilisées par les systèmes vivants pour mobiliser à leur prof […] Lire la suite
IONOPHORES
On nomme ionophores des substances qui perméabilisent les membranes cellulaires vis-à-vis du passage des ions. C'est le cas notamment de certains antibiotiques qui perturbent le fonctionnement des mitochondries, rendant leur membrane perméable aux ions alcalins et découplant les phosphorylations des oxydoréductions respiratoires auxquelles elles sont normalement conjuguées. Alors que les ions alca […] Lire la suite
LEHNINGER ALBERT L. (1917-1986)
Mort le 4 mars 1986 au terme d'une longue carrière de chercheur et d'enseignant, Albert L. Lehninger est universellement connu des étudiants en sciences et en médecine pour ses livres d'enseignement dont le premier, paru en 1970 sous le simple titre de Biochemistry , renouvelle complètement l'écriture des livres de cette discipline. Contrairement à ses prédécesseurs en ce domaine, A. L. Lehninger […] Lire la suite
LEVURES
Dans le chapitre « Morphologie, cytologie et reproduction » : […] Les Levures, bien qu'utilisées inconsciemment par l'homme depuis plus de 5 000 ans pour la préparation de boissons alcoolisées, ne sont en fait considérées comme les êtres vivants unicellulaires responsables de la fermentation que depuis le xix e siècle. F. J. F. Meyen, en 1837, propose le nom de Saccharomyces pour la levure de bière, organisme incolore de petite taille, qui se reproduit par bou […] Lire la suite
LIPIDES
Dans le chapitre « Acides saturés » : […] L' étude du mécanisme de la dégradation des acides gras a débuté avec les travaux de F. Knoop (1904) : des animaux, nourris avec des acides gras dans lesquels un cycle benzénique se substitue à un atome d'hydrogène sur le dernier carbone de la chaîne, excrètent dans l'urine (sous forme d'amides avec le glycocolle) des produits contenant un cycle benzénique et dont la nature varie selon que l'acid […] Lire la suite
Voir aussi
- ADN POLYMÉRASE
- ARN DE TRANSFERT ou ARNt
- ARN MESSAGER ou ARNm
- ARN POLYMÉRASE
- ARN RIBOSOMIQUE ou ARNr
- CHLORAMPHÉNICOL
- CHOLINE & PHOSPHODÉRIVÉS CHOLINIQUES
- CODON biologie moléculaire
- CYTOCHROME OXYDASE
- HÉRÉDITÉ CYTOPLASMIQUE
- ÉPISSAGE génétique moléculaire
- EXON
- EXPRESSION GÉNÉTIQUE
- GÈNES EN MOSAÏQUE
- GÉNÉTIQUE MOLÉCULAIRE
- GÉNOME
- GÉNOME HUMAIN
- HÉRÉDITAIRES MALADIES ou MALADIES GÉNÉTIQUES
- HÉRÉDITÉ FAMILIALE
- INHIBITEURS biochimie
Pour citer l’article
Roger DURAND, « MITOCHONDRIES », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 16 août 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/mitochondries/