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MICROCOSME ET MACROCOSME

Du XVIe siècle au renversement pascalien

C'est au xvie siècle que la notion de microcosme devient envahissante : de Paracelse (1493-1541) à Bruno (1548-1600), de Cardan (1501-1576) à Campanella (1568-1639), elle pénètre la littérature, la philosophie, la science et l'art. La nature apparaît comme une force vitale, exubérante, produisant à l'infini. Les êtres sont ses enfants, tout est animé, et il suffit d'un peu de savoir pour comprendre combien souffrent les grottes ou les mines lorsqu'on creuse en elles des excavations. À l'animisme universel répond une sorte de panvitalisme teinté de magie. Nul plus que Paracelse n'a développé ce point de vue. Médecin de génie (il a découvert le rôle du mercure dans le traitement de la syphilis), vagabond, esprit curieux et passionné, il prétend apprendre plus auprès des bonnes femmes que dans les livres latins ou grecs. Toute sa science consiste à mettre en accord les astres et la maladie : « Qu'est-il de plus beau et de plus sublime au médecin que d'accorder l'une et l'autre astronomies (à savoir du macrocosme et du microcosme) en lesquelles est posé le fondement certain de toutes les maladies ? [...] Car la nature veut qu'en toutes choses la préparation que l'homme fait soit semblable à la sienne. » Il s'agit donc une fois de plus de déterminer un système de correspondances. Paracelse retrouve toutes les vieilles idées ; à chaque organe correspond un astre : au cœur le Soleil, à la rate Saturne, au cerveau la Lune, etc. Mais sa pratique est plus riche techniquement que celle de beaucoup de ses contemporains. Quant à sa philosophie, très compliquée dans le détail, elle reste une des sources de tout le mouvement théosophique ultérieur. Elle inspira en particulier Jakob Böhme (1575-1624) et, par certains aspects, les romantiques allemands.

Le système de Copernic - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Le système de Copernic

Mais les véritables révolutions se préparaient dans un autre domaine. L'antique conception du cosmos était remise en question dans le De revolutionibus orbium coelestium (1543) de Copernic qui prouvait que l'hypothèse du mouvement de la Terre permettait de rendre compte des apparences célestes plus sérieusement que le système de Ptolémée. Enthousiasmé, mais imprudent, Bruno généralisa à l'univers entier ce que Copernic avait seulement admis pour le système solaire. Il montra, en s'appuyant sur la coïncidence des contraires de Nicolas de Cues, la nécessité théorique de poser un univers infini, peuplé de mondes innombrables tournant avec leurs planètes autour de leur soleil. Une seule matière, un seul espace, une seule vie forme la trame de cet ensemble où chaque individu participe à la totalité en tant qu'il est une image réduite de l'infini. Mais Bruno va plus loin que ses contemporains parce qu'il ne superpose pas au macrocosme un Dieu créateur et radicalement séparé. Pour lui, la « puissance de faire » ne peut s'entendre sans la « puissance d'être fait », c'est-à-dire que Dieu ne peut être conçu sans l'univers. L'idée d'unité domine donc ce système, contrairement à Ficin, par exemple, qui croyait à des degrés de l'être. Théoriquement minimum et maximum coïncident : « Dans le minimum, le simple, la monade, tous les opposés sont la même chose, pair et impair, beaucoup et peu, finis et infinis ; c'est pourquoi ce qu'est le maximum, le minimum l'est aussi » (De minimo). Quant à l'homme, microcosme privilégié, il a pour rôle de découvrir par la pensée l'unité cachée de l'univers. Mais ici un renversement se produit : la contemplation béate de la totalité devient impossible. L'infini échappe par principe au fini, et le héros de Bruno, semblable au papillon qui se brûle les ailes à la lumière, ne sera pas apaisé par sa quête. Il lui restera une sorte de fureur et d'insatisfaction qui lui montrera[...]

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Le système de Copernic - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

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