JEUX OLYMPIQUES La notion d'amateurisme
Le tournant de 1981
Sur la question de l'amateurisme comme dans d'autres domaines, tout change avec l'élection de Juan Antonio Samaranch à la présidence du C.I.O. le 16 juillet 1980. En septembre 1981, le C.I.O. tient à Baden-Baden le onzième congrès de son histoire. Juan Antonio Samaranch évoque de multiples pistes pour réformer le mouvement olympique, qu'il veut ancrer dans son époque. Parmi les mesures adoptées, il en est une qui met un terme à près d'un siècle d'immobilisme et à trente ans de supercherie : toute référence à l'amateurisme sera bientôt gommée de la Charte olympique. Dès lors, Samaranch souhaite que les Jeux s'ouvrent aux sportifs professionnels, « officiels » comme « officieux ». Les professionnels sont admis par étapes aux Jeux : footballeurs (s'ils n'ont jamais participé à la Coupe du monde) en 1984 ; tennismen en 1988... En 1992, le formidable spectacle proposé par les basketteurs multimillionnaires de la National Basketball Association (N.B.A.) qui composent la « Dream Team » des États-Unis constitue le symbole de l'ouverture des Jeux aux sportifs professionnels. Les cyclistes du Tour de France sont invités en 1996, les hockeyeurs de la N.H.L. en 1998. Seuls deux sports ne sont pas totalement ouverts aux professionnels : la boxe, car les règles sont très différentes pour les amateurs et les professionnels ; le football, car la F.I.F.A. craint que la présence aux Jeux des meilleurs footballeurs de la planète fasse un jour concurrence à sa Coupe du monde.
Il faut néanmoins attendre les années 2000 pour que les sportifs professionnels, habitués à organiser leur saison en fonction d'événements particuliers et historiquement fondamentaux pour un palmarès (Tour de France pour les cyclistes, tournois du Grand Chelem pour les tennismen, Championnat N.B.A. pour les basketteurs, Coupe Stanley pour les hockeyeurs sur glace...), fassent réellement du rendez-vous olympique une priorité. Enfin, si un titre olympique ne donne lieu à aucune récompense pécuniaire de la part du C.I.O., certains États offrent en revanche des primes à leurs médaillés. Ainsi, aux Jeux de Londres en 2012 et de Sotchi en 2014, chaque médaillé d'or français recevait une prime de 50 000 euros, une somme non négligeable, par exemple, pour la championne de V.T.T. Julie Bresset, qui ne peut pas vivre de son sport. Mais cette somme rondelette est loin d'être un record : en effet, en 2008 à Pékin, le gouvernement russe promettait 100 000 euros, la Malaisie 200 000 euros, alors que le président Géorgien Mikheïl Saakachvili, désireux de motiver ses champions, « missionnés » pour porter haut les couleurs de la Géorgie alors que son pays était en guerre avec la Russie, promettait 472 000 euros pour une médaille d'or. Les trois champions olympiques géorgiens de 2008 (les lutteurs Manuchar Kvirkvelia et Revazi Mindorashvili, le judoka Irakli Tsirekidze) touchèrent-ils les 472 000 euros promis par le président ? On l'ignore, mais personne ne serait tenté de remettre en cause leur médaille d'or, alors que Jim Thorpe dut restituer ses récompenses pour avoir touché quelques poignées de dollars...
En 2016, à Rio de Janeiro, « Tiger » Woods, qui devint en 2010 le premier sportif à avoir gagné plus d'1 milliard de dollars durant sa carrière, participera peut-être à la compétition de golf... Qu'en penserait le baron de Coubertin ?
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
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Pour citer cet article
Pierre LAGRUE, « JEUX OLYMPIQUES - La notion d'amateurisme », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :