GRANDE MOSQUÉE DE KAIROUAN (Tunisie)
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La Grande Mosquée de Kairouan, ville du centre de la Tunisie, témoigne de l'importance du passé de la ville.
En 670, le général arabe Oqba ibn-Nafi, qui mena la conquête de l’Ifriqiya, fit édifier à Kairouan une des plus grandioses mosquées du monde musulman. Le gouverneur de l’Ifriqiya Ḥasan ibn Nu‘mān remplace l'édifice primitif par une nouvelle mosquée en 695 ; celle-ci, devenue trop petite, est agrandie en 723 aux frais de Hishām, le calife omeyyade de Damas, qui lui fait donner les dimensions de la mosquée actuelle. Le minaret carré aurait été commencé à ce moment. Construit en brique du côté nord, dans l'axe du mihrab, il a 30 mètres de hauteur pour environ 10 mètres à la base. Le modèle de cette tour à trois étages en retrait doit être recherché dans le Phare d'Alexandrie. En 774, le gouverneur Yazīd ibn Ḥātim fait à son tour abattre toute la mosquée, à l'exception du mihrab, et la reconstruit à nouveau. Cet édifice aurait été remplacé en 836 par un autre, œuvre de l'Aghlabide Ziyādat Allāh. La grande mosquée actuelle ne comprendrait donc, hormis le mihrab désormais enfermé entre deux murs et visible à travers une fenêtre grillagée, aucun élément antérieur au ixe siècle.
L'ensemble de la cour et de l'oratoire devait avoir à l'origine les dimensions actuelles (80 mètres de large et 135 mètres de profondeur) ; un peu plus du tiers finira par être occupé par la salle de prière. Celle-ci comprend dix-sept nefs à toit plat orientées perpendiculairement au mur de la qibla avec une nef centrale plus haute et plus large. À l'intérieur, 414 colonnes monolithes, provenant de monuments antiques, supportent le toit plat. Chaque chapiteau repose sur une imposte qui reçoit la retombée d'un arc légèrement outrepassé, des tirants renforçant les piles des arcs alignés en profondeur. En 836, la salle de prière de Ziyādat Allāh comprend quatre travées dont une plus large au fond. Devant le mihrab, l'intersection de la nef centrale et de la travée large est surmontée d'une coupole à larges côtes reposant sur un tambour octogonal aux faces légèrement concaves dressé sur un massif carré creusé de niches. En 862, Abū Ibrāhīm agrandit l'oratoire de trois travées vers le nord. En 875, Ibrāhīm II construit encore trois travées aux dépens de la cour, également amputée sur les trois autres côtés par des galeries doubles. Ainsi la salle de prière s'ouvrira désormais sur la cour par treize arcs. Au-dessus de l'entrée, une seconde coupole à côtes sur tambour percé de fenêtres, la qubba Bāb al-Bahw, repose sur un premier tambour carré. La salle de prière, au terme de ses agrandissements, compte dix travées et présente un plan basilical où la nef centrale et la travée terminale font apparaître un tracé en T. Les épais murs en brique, dotés de contreforts, sont percés de quatorze portes. À l'est, un porche couvert d'une coupole à côtes, le Bāb Lalla Rayhāna, s'ouvre dans un saillant carré. Les influences de l'art ‘abbāsside se traduisent par l'emploi de carreaux de faïence à reflets métalliques analogues à ceux de Samarrā, par l'usage du défoncement des façades en niche plate ou en cul de four et par des trompes pour le passage du carré au polygone. La Grande Mosquée de Kairouan est l'œuvre capitale de l'Islam au Maghreb, comme la Grande Mosquée de Cordoue l'est en l'Espagne.
L’ensemble architectural qu’elle forme avec la mosquée des Trois Portes, le mausolée de Sidi Sahbi et les bassins des Aghlabides est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1988.
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Écrit par
- Nikita ELISSÉEFF : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Lyon
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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Médias