GÉOMÉTRIE ALGÉBRIQUE

Variétés algébriques

L'utilisation des fonctions régulières ne conduit à rien dans l'étude des ensembles algébriques projectifs, puisque l'anneau des fonctions régulières d'un tel ensemble est toujours réduit à k. On peut remplacer les fonctions régulières par les fonctions rationnelles. La théorie ainsi construite permet l'étude des propriétés conservées par une équivalence birationnelle ; elle a été développée à la fin du xix e siècle, principalement en Italie. Cette méthode interdit la distinction entre des ensembles algébriques birationnellement équivalents, même non isomorphes. Il faut donc chercher dans une autre direction pour obtenir une définition intrinsèque des variétés algébriques.

En localisant la notion de fonction régulière, on arrive à une notion adéquate. Commençons par munir les ensembles algébriques d'une topologie qui permette une telle localisation.

Topologie de Zariski

Si le corps de base est celui des nombres complexes, on peut essayer la topologie induite par celle de C n ou P n (C) (c'est la topologie transcendante, définie à partir de la valeur absolue d'un nombre complexe). Il est clair, en effet, que les applications régulières sont continues pour cette topologie ; par suite, les isomorphismes la conservent. Mais cela ne convient pas au cas d'un corps de base général.

On veut une topologie adaptée à l'étude des propriétés algébriques ; ainsi les propriétés algébriques (ou du moins beaucoup d'entre elles) doivent avoir une nature locale pour la topologie cherchée : par exemple, une fonction rationnelle définie en un point doit rester définie au voisinage de ce point. Or les ensembles exceptionnels où les propriétés algébriques considérées cessent d'être vraies sont définis par des équations polynomiales (l'annulation du dénominateur dans le cas de la définition d'une fonction rationnelle) ; ce sont eux-mêmes des ensembles algébriques. Ainsi, nous imposons la condition suivante : les ensembles algébriques doivent être fermés pour la topologie cherchée. Il se trouve qu'il existe sur k n , ou sur P n (k), une topologie bien déterminée pour laquelle les ensembles fermés sont les ensembles algébriques : on l'appelle la topologie de Zariski.

En effet, l'intersection d'une famille (E i ) i  ∈I d'ensembles algébriques est encore algébrique ; si E i est défini par les équations f i λ = 0,λ ∈ Λ i , cette intersection est définie par l'annulation de tous les polynômes  f i λ : c'est l'ensemble des zéros communs aux polynômes de l'idéal engendré par les f i λ et il suffit de prendre un ensemble fini de générateurs de cet idéal pour avoir un système d'équations de l'intersection (rappelons la propriété noethérienne de l'anneau des polynômes ; dans le cas projectif, il faut bien sûr prendre des générateurs homogènes). Considérons maintenant la réunion de deux ensembles algébriques, définis respectivement par les équations f  1 = 0, f  2 = 0, ..., f  r  = 0 et g 1 = 0, g 2 = 0, ..., g s  = 0 ; c'est l'ensemble des zéros communs aux polynômes f i g j (1 ≤ i ≤ r, 1 ≤ j  s), donc un ensemble algébrique. Enfin l'ensemble vide est algébrique, étant défini par l'équation 1 = 0. Ainsi les axiomes des fermés d'une topologie sont vérifiés par les ensembles algébriques (cf. topologie - Topologie générale). Dorénavant nous considérons k n et P n (k) comme munis de leurs topologies de Zariski, et tout ensemble algébrique affine ou projectif est muni de la topologie induite ; toute variété algébrique affine est de même munie de sa topologie de Zariski.

Si (X, A, ϕ) est une variété algébrique affine, une base[...]

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Écrit par

  • Christian HOUZEL : directeur de recherche au C.N.R.S., professeur à l'université de Paris-VIII-Denis-Diderot

Classification

Pour citer cet article

Christian HOUZEL, « GÉOMÉTRIE ALGÉBRIQUE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

Médias

Isomorphisme

Isomorphisme

Isomorphisme

Isomorphisme d'une droite et d'une parabole

Cissoïde

Cissoïde

Cissoïde

Cissoïde

Paraboloïde

Paraboloïde

Paraboloïde

Paraboloïde

Autres références

  • ALGÈBRE

    • Écrit par Jean-Luc VERLEY
    • 39 281 mots
    Il n'est pas question même d'esquisser ici l'histoire de la géométrie algébrique, qui était au départ l'étude des courbes algébriques, et qui, sous sa forme actuelle, la théorie des schémas, due au mathématicien français A. Grothendieck, est devenue une des branches les plus abstraites et[...]
  • CASTELNUOVO GUIDO (1865-1952)

    • Écrit par Jean-Luc VERLEY
    • 1 874 mots

    Mathématicien italien dont les travaux ont porté principalement sur la géométrie algébrique. Né à Venise, Castelnuovo fut l'élève de Véronèse à Padoue ; assistant à Turin, il eut avec C. Segre de nombreux entretiens d'où devait sortir l'exposé de la géométrie sur une courbe algébrique,[...]

  • CHEVALLEY CLAUDE (1909-1984)

    • Écrit par Jean DIEUDONNÉ
    • 1 422 mots

    Fils d'ambassadeur, né à Johannesburg, Chevalley a fait la plus grande partie de ses études à Paris, où il fut élève de l'École normale supérieure, de 1926 à 1929. Il a enseigné à l'université de Rennes, puis aux États-Unis, aux universités de Princeton et de Columbia (New York). Il termina[...]

  • CLEBSCH RUDOLF FRIEDRICH ALFRED (1833-1872)

    • Écrit par Jeanne PEIFFER
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    Le mathématicien allemand Rudolf Friedrich Alfred Clebsch est né le 19 janvier 1833 à Königsberg (auj. Kaliningrad) et mort le 7 novembre 1872 à Göttingen. Il fit ses études à l'université de sa ville natale (1850-1854). Quoique Jacobi ne donnât plus de cours, l'école qu'il[...]

  • CONTINU & DISCRET

    • Écrit par Jean-Michel SALANSKIS
    • 42 192 mots
    [...]qualités particulières du support topologique, et d'obtenir ainsi une technique nouvelle (« détournée ») pour démontrer des résultats topologiques. La géométrie algébrique, inversement, fabrique un objet « géométrique » (mais cet adjectif est ici synonyme de topologique) à partir de tout anneau commutatif[...]
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Voir aussi