GÈNES, biologie

La génétique tire sa terminologie – héritage, transmission, patrimoine – de questions pratiques assez éloignées de la biologie. Le mot latin hereditas désigne les biens, titres et fonctions qu'un homme laisse à sa mort et le droit pour ses enfants d'en prendre possession. L'utilisation de ce terme en biologie date du xixe siècle. De même que les parents transmettent à leurs enfants leur maison, ils transmettent aussi leurs caractéristiques physiques personnelles : taille, couleur des yeux, des cheveux, etc. Cependant, alors qu'ils transmettent la maison elle-même, ils ne transmettent pas leurs yeux. L'idée centrale de la génétique est qu'ils en transmettent un déterminant. La couleur des yeux est transmise par l'intermédiaire de quelque chose qui n'est pas la couleur elle-même : c'est le gène de la couleur des yeux. Cela permet de distinguer le génotype (le déterminant de la couleur des yeux) du phénotype (la couleur des yeux elle-même). Grâce à ces définitions, il devient possible de distinguer un caractère héréditaire et un caractère acquis. Le caractère héréditaire est celui qui est présent dans le génotype. Le caractère acquis est celui qui est présent dans le phénotype, mais pas dans le génotype. Ainsi, l'éternel débat de l'inné et de l'acquis est indissociable des concepts inventés par la génétique au début du xxe siècle.

La génétique mendélienne

En 1900, trois articles indépendants paraissent dans les Actes de la société allemande de botanique, sous les signatures de Hugo De Vries, Karl Correns et Erich Tschermak von Seysenegg. Ils présentent des règles tirées des travaux du moine autrichien Gregor Mendel, publiés quarante ans plus tôt. Ces règles reposent sur le postulat de l'existence de facteurs internes discrets, transmis de génération en génération, et qui agiraient sans se mélanger ou se contaminer, mais au contraire en gardant leur individualité. C'est l'acte de naissance généralement admis de la génétique, qui ne sera baptisée ainsi qu'en 1906, au cours du congrès international de botanique à l'occasion de la communication de William Bateson. En 1909, le Danois Wilhelm Johannsen forge le mot « gène » (gen, en allemand) qu'il entend substituer aux gemmules (Darwin) ou aux pangènes (De Vries). Avec ce terme, il cherche à proposer une définition minimale des déterminants élémentaires transmissibles, en les débarrassant de toute référence à un préformationnisme obsolète. Pour De Vries, l'individu n'est que l'agrandissement de sa collection de pangènes. Or cette vision est incompatible avec la distinction, introduite par August Weismann en 1886, entre lignées cellulaires germinale et somatique : la première engendrera les gamètes responsables de la transmission des caractères, sans influence extérieure, par opposition à la seconde qui formera les tissus, lesquels, sous l'influence de l'environnement, vont donner le reste de l'organisme, par l'expression des caractères. Cette distinction fondamentale pour la génétique est depuis connue sous le nom de séparation entre soma et germen.

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Classification

. In Encyclopædia Universalis []. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CONCEPT UN GÈNE-UNE ENZYME

    • Écrit par Nicolas CHEVASSUS-au-LOUIS
    • 246 mots

    Pour démontrer que les gènes influent chimiquement sur l'hérédité, George W. Beadle (1903-1989) décide de travailler sur un champignon microscopique, Neurospora crassa, facilement cultivable sur un milieu artificiel qui ne contient que du sucre et des sels minéraux. Associé au microbiologiste...

  • STRUCTURE EXONS-INTRONS DES GÈNES

    • Écrit par Gabriel GACHELIN
    • 654 mots

    La découverte en 1978 de la structure discontinue des gènes marque une étape importante dans l’histoire de la génétique. Auparavant, on avait démontré que la mémoire génétique d’un organisme était inscrite dans son ADN et plus précisément codée par la suite linéaire de ses molécules...

  • ADN (acide désoxyribonucléique) ou DNA (deoxyribonucleic acid)

    • Écrit par Michel DUGUET, Universalis, David MONCHAUD, Michel MORANGE
    • 10 074 mots
    • 10 médias
    ...contrôler la synthèse des protéines, molécules responsables des fonctions élémentaires de la cellule, et en particulier des fonctions de catalyse enzymatique. Dès 1940, les Américains George Beadle et Edward Tatum avaient démontré l'existence d'une relation précise, soupçonnée dès le début du ...
  • ANIMAUX MODÈLES, biologie

    • Écrit par Gabriel GACHELIN, Emmanuelle SIDOT
    • 9 552 mots
    • 8 médias
    ...souris n'a en effet pas exactement les mêmes propriétés que celui de l'homme. Un autre élément de réponse réside dans le fait que les produits de nombreux gènes ont une action partiellement redondante avec les produits d'autres gènes, en sorte que l'inactivation de l'un n'entraîne pas nécessairement l'abolition...
  • ANTIBIORÉSISTANCE

    • Écrit par Aurélie CHABAUD, Sylvain MEYER, Marie-Cécile PLOY
    • 5 907 mots
    • 4 médias

    Les antibiotiques sont des molécules naturellement produites par des bactéries ou des champignons, et qui contribuent à l’équilibre entre populations de micro-organismes au sein d’une niche écologique. L’utilisation d’antibiotiques pour prévenir ou traiter une infection, pour accélérer la croissance...

  • ARCHÉOBACTÉRIES ou ARCHÉES

    • Écrit par Patrick FORTERRE
    • 2 138 mots
    Toutefois,les archées possèdent également certains caractères bactériens, tel le regroupement des gènes en opérons et l'absence d'introns (régions non codantes) dans les gènes codant pour des protéines. Certains évolutionnistes, qui persistent à privilégier la distinction entre un grade procaryote et...
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Voir aussi