ESPAGNE (Arts et culture)La langue
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L'espagnol dans le monde
Nombre de locuteurs
L'Espagne compte quarante-six millions de locuteurs. En Amérique hispanique, les statistiques portent sur la population totale des pays, bien que plusieurs milliers d'indigènes ne soient pas vraiment bilingues.
Langue espagnole en Amérique latine
Répartition (en millions) des locuteurs de langue espagnole en Amérique latine (1992).
Crédits : Encyclopædia Universalis France
Les États-Unis ont vu s’accroître de manière notable le nombre d’hispanophones (près de 47 millions en 2008). Mentionnons également la présence de locuteurs aux Philippines, au Moyen-Orient (judéoespagnol) et en Afrique (Ceuta, Melilla...).
La péninsule Ibérique
Le castillan (castellano) « est la langue espagnole officielle de l'État » (Constitution du 6 déc. 1978) et « les autres langues espagnoles seront également officielles dans chacune des communautés autonomes en accord avec leurs statuts ». La situation linguistique varie selon les régions. À l'est, la Catalogne, les provinces du Levant et les îles Baléares sont bilingues : le catalan, sous différentes variantes, est la langue parlée usuelle pour une partie importante de la population ; elle est le moyen d'expression d'une littérature vivante et de plusieurs journaux. Au centre-nord, dans quelques vallées pyrénéennes, on parle encore des dialectes aragonais. Dans les provinces de Biscaye (Bilbao), Guipúzcoa (San Sebastián) et Álava (Vitoria), le basque est abondamment parlé et écrit. En suivant la côte cantabrique vers l'ouest, on rencontre l'asturien (continué plus au sud par le léonais), en régression, mais qui tente de se conserver. À l'extrême nord-ouest, le galicien est parlé, sous deux variétés, et possède une littérature essentiellement poétique. Dans le reste de l'Espagne, seul le castillan s'emploie, avec des variantes locales, principalement l'andalou, caractérisé par sa phonétique au consonantisme très relâché, sa prosodie spécifique et un lexique souvent original. Le parler de la Vieille-Castille est le plus traditionnel. À Madrid, où se mêlent des populations d'origines diverses, le parler subit peu à peu une influence andalouse, surtout dans les quartiers périphériques.
Un parler argotique familier fait des emprunts à l'argot gitan (caló), lorsque ses mots perdent leur caractère secret (beata, « peseta » ; chaval, « enfant » ; gachó, « homme »), et on fabrique des termes par déformation de la langue courante. La phraséologie populaire est très développée (estar chiflado, « être toqué, maboule » ; tomar el pelo, « se moquer de, railler »...). Certains faits phonétiques ou grammaticaux dénotent des niveaux de langue, du populaire (tomao pour tomado, güevo pour huevo), au vulgaire (haiga pour haya, subjonctif de haber ; siéntensen pour siéntense, « asseyez-vous » ; me se olvidó pour se me olvidó, « j'ai oublié » ; si él vendría pour si él viniera, « s'il venait »).
Des institutions comme la Real Academia Española ou l'Institut de coopération ibéroaméricaine tentent de freiner, dans la mesure du possible, la trop rapide différenciation de l'espagnol péninsulaire et de l'espagnol américain. On constate que, même lorsqu'il s'agit de néologismes désignant des objets bien définis, l'accord n'est pas réalisé. Le magnétophone a connu au moins quatre formes : magnetófono qui a remplacé magnetofón en Espagne, et grabador, grabadora employés en Amérique.
L'Amérique
La situation actuelle de l'espagnol en Amérique est complexe, étant donné sa grande extension et les divers facteurs de différenciation régionale (ethniques, sociaux, géographiques).
On a remarqué que les langues indiennes de la cordillère des Andes sont plus riches en consonnes que celles des plaines : on constate que l'espagnol andin a souvent tendance à réduire l'expression vocalique (que ce soit à Quito ou même à Mexico), alors qu'au contraire les consonnes sont faiblement prononcées à Caracas ou aux Antilles. Le substrat indigène est toujours difficile à déceler dans la phonétique : l'espagnol paraguayen (les quatre cinquièmes de la population sont bilingues) a hérité l'attaque dure glottale devant l'initiale vocalique des mots, selon le modèle du guarani. Mais c'est surtout dans le domaine lexical que se trouvent les marques de l'influence indigène. En voici quelques exemples. Sont empruntés au nahuatl (Mexique) : tomate, aguacate (« avocat », le fruit), tiza (« craie »), jícara (« tasse à chocolat »), chicle (« chewing gum ») ; à l'arawak : canoa (dès 1492), cacique, maíz, batata, hamaca, huracán (« ouragan ») ; au caribe (caraïbe) : curare, piragua (« pirogue »), caimán ; au quechua (Équateur, Pérou, Bolivie [...]
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Écrit par :
- Bernard POTTIER : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, professeur de linguistique générale à l'université de Paris-IV-Sorbonne
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Pour citer l’article
Bernard POTTIER, « ESPAGNE (Arts et culture) - La langue », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 22 mai 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/espagne-arts-et-culture-la-langue/