ESCHYLE (env. 525-456 av. J.-C.)
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Les cités et les hommes
Le théâtre d'Eschyle traite, en général, des événements humains les plus graves : dans les familles, le meurtre ; dans les cités, la guerre. Un des premiers traits originaux de ce théâtre est, en effet, de ne point se situer au niveau des individus. Et tout commence avec la guerre et le destin de la cité.
En vérité, la grande expérience de la vie d'Eschyle avait bien été la guerre deux fois victorieuse contre l'envahisseur venu d'Asie. Et le fait est qu'elle gronde un peu partout dans son théâtre. On la trouve, à peine transposée, dans cette tragédie des Perses, qui est la plus ancienne que nous ayons et qui évoque la victoire, alors récente, des Athéniens à Salamine. On la trouve aussi dans Les Sept contre Thèbes, où est décrite l'atmosphère de Thèbes, assiégée par un des deux fils d'Œdipe. On la trouve encore dans Agamemnon, où l'on assiste au retour du roi, qui vient enfin de prendre Troie et va maintenant payer le prix de sa victoire.
Ces guerres impliquent toutes la mort et la souffrance, même la guerre récente évoquée dans Les Perses, car, là où l'on attendrait un facile chant de victoire, on a une longue plainte sur la misère des vaincus, sur le deuil perse.
Un peu partout dans son théâtre, la brutalité de la guerre est évoquée en formules saisissantes. Eschyle a décrit, dans Les Perses, le carnage anonyme des batailles et ces Grecs qui, à Salamine, « comme s'il s'agissait de thons, de poissons vidés du filet, frappent, assomment, avec des débris de rames, des fragments d'épaves ». Il a décrit ailleurs, dans Les Sept contre Thèbes, l'épouvante qui règne dans les villes mises à sac, avec les femmes « traînées, veuves de défenseurs, hélas ! jeunes et vieilles à la fois – par les cheveux, ainsi que des cavales ». Et, allant plus loin, il a su faire sentir, dans Agamemnon, le scandale de la mort, frappant au loin de jeunes guerriers dont seules reviendront les cendres : « Arès, changeur de mort, dans la mêlée guerrière a dressé ses balances, et d'Ilion, il renv [...]
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Écrit par :
- Jacqueline de ROMILLY : ancienne élève de l'École normale supérieure, membre de l'Institut, professeur au Collège de France
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Pour citer l’article
Jacqueline de ROMILLY, « ESCHYLE (env. 525-456 av. J.-C.) », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 22 janvier 2021. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/eschyle/