MULTINATIONALES ENTREPRISES

Les déterminants de la multinationalisation des entreprises

Pourquoi une entreprise veut-elle devenir multinationale ? En principe, pour s'implanter à l'étranger, une firme doit avoir un avantage spécifique (firm specific advantage ou ownership advantage), c'est-à-dire un avantage technologique, de coût ou de différenciation par rapport aux entreprises du pays d'accueil potentiel. Stephan Hymer (1960) a, le premier, mis en avant cet argument qui permettait de comprendre pourquoi une entreprise étrangère, malgré les coûts de transfert engendrés par une implantation à l'étranger, pouvait tout de même concurrencer les entreprises locales déjà installées sur place. Dans la théorie contemporaine de l'investissement direct, cet avantage est souvent analysé comme un actif spécifique qui peut prendre la forme d'un investissement en recherche et développement (R&D) nécessaire à la production. Ce dernier revêt ensuite l'aspect d'un bien public à l'intérieur de la firme puisque toutes les unités de production, filiales étrangères, y ont accès gratuitement, entraînant des économies d'échelle pour les firmes multinationales à implantations multiples. Cette condition nécessaire n'est toutefois pas suffisante car elle n'explique pas pourquoi une firme ressent le besoin de s'implanter à l'étranger au lieu de se contenter d'exploiter ses avantages à l'aide d'exportations.

Trois grandes motivations de la multinationalisation peuvent être mises en avant. En s'implantant à l'étranger, l'entreprise recherche alternativement ou simultanément de meilleures conditions d'offre, de meilleures conditions de demande, une meilleure position concurrentielle face à ses concurrents.

La recherche de meilleures conditions d'offre : coûts, approvisionnement et technologie

La recherche du moindre coût

Cet argument est souvent avancé pour expliquer la multinationalisation et cristallise le débat sur les délocalisations. Il repose implicitement sur plusieurs hypothèses :

– la compétitivité du produit résiderait dans son coût et dans un prix le plus bas possible. Le coût de la main-d'œuvre serait prédominant dans le prix de revient ;

– La main-d'œuvre est censée avoir la même productivité partout dans le monde. En fait, ce sont les différences de productivité (coût unitaire) et non plus de coût horaire de la main-d'œuvre qu'il faut pouvoir apprécier ;

– le produit est supposé parfaitement délocalisable, et les coûts de transport ou d'éloignement du marché ne jouent pas un rôle important.

Dans ce cadre d'hypothèses, le produit délocalisé est nécessairement un produit standard tel qu'il est décrit dans l'approche du cycle du produit. À la fin de son cycle, lorsque le produit est banalisé, la concurrence s'effectue principalement en termes de prix. L'intensité en travail peu qualifié dans la fabrication du bien peut inciter l'entreprise à rechercher de la main-d'œuvre au moindre coût.

Dans le cas d'un produit segmentable, l'intensité de la main-d'œuvre (en particulier peu qualifiée) ne sera pas la même selon les différents stades du processus de production. La recherche du moindre coût pourra amener une délocalisation partielle de la seule production concernant le segment intensif en main-d'œuvre peu qualifiée.

En réalité, un tel comportement ne détermine que minoritairement les décisions d'implantation à l’étranger.

Selon une enquête de l’Institut national de la statistique (I.N.S.E.E), le nombre de suppressions directes de postes en France dues à des délocalisations opérées entre 2009 et 2011 par les entreprises de 50 salariés ou plus peut être estimé à environ 20 000 soit environ 6 600 par an. Ces suppressions représentent 0,3[...]

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Jean-Louis MUCCHIELLI, « MULTINATIONALES ENTREPRISES », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

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Les critères de la multinationalisation

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Autres références

  • AGRICOLE RÉVOLUTION

    • Écrit par Abel POITRINEAU, Gabriel WACKERMANN
    • 56 404 mots
    – l'émergence de firmes multinationales susceptibles de créer des réseaux transnationaux aptes à modifier les tissus socio-économiques autochtones et à provoquer la naissance de solidarités contraignantes orchestrées depuis les grands sièges sociaux, souvent fort éloignés des terrains d'opération[...]
  • ALGÉRIE

    • Écrit par Charles-Robert AGERON, E.U., Sid-Ahmed SOUIAH, Benjamin STORA, Pierre VERMEREN
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    • Écrit par E.U., Françoise LÉVY-COBLENTZ, Raymond WOESSNER
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    [...]regroupe dans des niches de l'agroalimentaire (confitures, vinaigre, foies gras, charcuterie...), du textile haut de gamme ou des constructions mécaniques. Mais l'Alsace est devenue un réceptacle pour les investissements extérieurs : d'abord avec la décentralisation dans les années 1950 et 1960 (Rhône-Poulenc,[...]
  • ASIE (Géographie humaine et régionale) - Dynamiques régionales

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    • Écrit par Jean-Pierre AUDINOT, E.U., Jacques GARNIER
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    [...]4 800 dans l'Union, contre 102 seulement au Japon). Les plus petites sont en général des mutuelles très spécialisées sur un plan local ou professionnel.Les plus importantes constituent des groupes de dimension mondiale, intervenant dans toutes les branches d'assurances et dans de très nombreux pays.
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