ÉCONOMIE INDUSTRIELLE
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L'entreprise en économie industrielle
Avant d'aborder le fonctionnement des marchés, il faut s'interroger sur la nature de son acteur principal : l'entreprise.
L'entreprise comme processus de production
Dans l'analyse microéconomique traditionnelle, l'entreprise est abordée au travers de ses caractéristiques techniques. Elle est une organisation dont le but est de produire certains biens ou services. Pour produire ces biens, elle combine des facteurs de production, tels que la force de travail, le capital matériel (locaux, machines, etc.) et immatériel (savoir-faire, connaissance, etc.), des matières premières ou des biens intermédiaires. Les contraintes techniques de l'entreprise sont représentées par une fonction de production qui détermine les niveaux de production accessibles pour différentes combinaisons des facteurs de production. Étant donné les coûts des facteurs de production, il est possible de déterminer le coût total d'une combinaison de facteurs. Pour un objectif de production donné, le choix de la combinaison de facteurs la moins coûteuse définit le coût d'une production, c'est-à-dire le coût minimal que doit supporter l'entreprise pour réaliser cette production.
Le profit de l'entreprise est la différence entre le revenu engendré par les ventes de la production et le coût de cette dernière. Cette notion de profit s'étend facilement pour prendre en compte la nature temporelle des activités de l'entreprise ; elle correspond alors à la notion de valeur de l'entreprise qui inclut tous les flux de revenus et les coûts futurs, valorisés au moyen de techniques financières.
Dans ce contexte, l'objectif d'une firme est simple : maximiser le profit. Notons que l'on postule un objectif unique pour une entreprise constituée de nombreux individus. La question de savoir comment le consensus est atteint au sein de celle-ci n'est pas posée à ce stade.
Cette approche s'est révélée fructueuse pour étudier le lien entre le processus de formation des prix et les choix de production ; elle reste la base de nombreux travaux d'économie industrielle. Mais, en tant que théorie fondée sur les contraintes technologiques, son inconvénient est de n'expliquer que l'organisation des unités de production, et non celle de l'entreprise. Or la même production peut être obtenue avec deux entreprises disposant chacune d'une unité de production ou avec une seule entreprise disposant de deux unités de production. La forme particulière d'organisation que représente l'entreprise répond à d'autres considérations.
L'entreprise comme organisation
L'entreprise remplit deux fonctions. Tout d'abord, elle est une instance de coordination du processus de production. Dans La Richesse des nations (1776), Adam Smith présente la firme moderne comme une réponse à la complexité croissante des activités, en particulier à la division du travail. En second lieu, elle repartit la valeur créée entre les parties impliquées dans le processus, ainsi que les risques liés aux aléas de la production. Cependant, cela n'explique pas la forme particulière d'organisation qu'est la firme et pourquoi ces deux fonctions doivent être remplies au sein de celle-ci. Comme le souligne Ronald Coase dès 1937, la nature fondamentale des échanges qui s'opèrent au sein d'une entreprise n'est pas différente de celle des échanges qui s'opèrent sur les marchés. Telle entreprise peut faire effectuer la même opération en interne ou en faisant appel à un sous-traitant. Seul le mode de transaction change. Selon Coase, la question est donc de comprendre pourquoi tel type d'échange se fait au sein d'une entreprise, et tel autre sur les marchés. Il fonde alors son approche sur le fait que tout échange implique des coûts de transaction. L'échange se fera au sein d'une entreprise si le coût de transaction de cette opération est moins élevé dans l'entreprise que sur le marché. Les travaux de Coase ont eu une profonde influence sur l'analyse moderne de l'entreprise, telle qu'elle apparaît, dès le milieu des années 1970, en particulier dans les travaux d'Oliver Williamson qui a cherché à définir la nature de ces coûts de transaction. Au-delà des coûts directs (la négociation des échanges par exemple), cette notion de coûts englobe tous les facteurs qui lim [...]
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Écrit par :
- Bruno JULLIEN : directeur de recherche au C.N.R.S.
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Pour citer l’article
Bruno JULLIEN, « ÉCONOMIE INDUSTRIELLE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 08 mai 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/economie-industrielle/