CHANSON FRANÇAISE

De Saint-Germain-des-Prés aux yéyés

Édith Piaf et Marcel Cerdan

Édith Piaf et Marcel Cerdan

Édith Piaf et Marcel Cerdan

La chanteuse française Édith Piaf (1915-1963) et le boxeur français Marcel Cerdan (1916-1949) à…

La chanson de l'après-guerre louvoie entre plusieurs courants. À Saint-Germain-des-Prés, comme les dadaïstes de 1918, une jeunesse ne croit plus aux certitudes de ses aînés. Une école du non-sens, de la poésie – avec à sa tête Jacques Prévert –, cependant que les musiques louchent vers le jazz sans jamais le plagier, va amener un grand souffle de nouveauté, dans lequel le jeune Yves Montand (Ivo Livi, 1921-1991) va trouver son auteur de choc, Francis Lemarque (Nathan Korb, 1917-2002). C'est Juliette Gréco (née en 1927) qui chante Queneau, Prévert et Vian, c'est Nicole Louviers (1933-2003), jeune femme poète et romancière qui serait la première à s'être produite sur scène avec un répertoire qu'elle s'est entièrement constitué. C'est le temps de la rive gauche. Léo Ferré végète en attendant que Catherine Sauvage le révèle au public. Stéphane Golmann (1921-1987) n'est pas encore haut fonctionnaire à l'U.N.E.S.C.O. Cora Vaucaire impose sa simple préciosité. Les Frères Jacques constituent le pendant sophistiqué des Compagnons de la chanson. Piaf, elle, s'impose à New York et gagne ainsi le statut de « chanteuse nationale ». Germaine Montero (Germaine Heygel, 1909-2000) oscille entre théâtre et chanson.

Rive droite, la mode new look sévit : les chanteuses doivent être « chics », et Christian Dior habille Lucienne Delyle. La chanson française s'exporte : une Jacqueline François, une Line Renaud, une Renée Lebas chantent qui aux États-Unis, qui à Moscou, qui à Alexandrie.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, le Québec, privé des imports français, a développé une industrie de la chanson autonome. Alys Roby et ses espagnolades succèdent aux « turluttes » de La Bolduc (Mary-Rose-Anna Travers, 1894-1941). Et c'est un Québécois armé d'une guitare, de fraîcheur et de poésie, Félix Leclerc (1914-1988), qui va détrôner la chanson rive droite, si corsetée, menacée par l'insignifiant. Après lui, on peut écouter Georges Brassens, Léo Ferré qui peinait tant, Jacques Brel venu de Belgique, Charles Aznavour qui languissait, guidé par Piaf. Catherine Sauvage est populaire et racée, exigeante, bouleversée par Brecht. Et déjà, Gilbert Bécaud allie des talents de mélodiste hors pair, un jeu de piano original, des arrangements qui se souviennent de Duke Ellington et des textes polis, voire désuets. Tenace, Barbara travaille peu à peu à sa légende, à contre-courant des modes, à l'instar d'Anne Sylvestre. Gréco se cherche dans une chanson plus accessible que précédemment.

Jacques Brel à l'Olympia, 1964

Jacques Brel à l'Olympia, 1964

Jacques Brel à l'Olympia, 1964

Jacques Brel à l'Olympia en 1964. «Cette anti-star qui savait empoigner le public a toujours vécu en…

Charles Aznavour

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« Formi formidable » chanteur populaire qui a su se tailler un destin à la hauteur de ses rêves,…

Serge Gainsbourg et Jane Birkin

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Le Français Serge Gainsbourg (1928-1991), auteur-compositeur-interprète, et l'actrice et chanteuse…

Pendant que la jeune génération de la rive gauche, déplacée vers la rue Mouffetard, prépare une modernisation des musiques de la chanson poétique (Jehan Jonas), c'est le raz de marée des yéyés. À partir de 1958, sur ce qui est alors la première radio commerciale, Europe n0 1, « Salut les copains ! », une émission aux méthodes contestables – « matraquages », faux hit-parades – ravage le paysage de la chanson française. Beaucoup de talents prometteurs, comme Guy Bontempelli, ne s'en remettront pas, beaucoup de carrières s'arrêteront brutalement : il n'y a plus de débouché pour la chanson intelligente. Les monstres restent, ou tournent casaque, comme Serge Gainsbourg. Et les nouvelles idoles – Johnny Hallyday et Eddy Mitchell mis à part – ne sont pas exportables dans le pays de leurs rêves : les États-Unis. Leur répertoire est somme toute médiocre, leurs prestations scéniques parfois poussives, avec de surcroît l'utilisation du play-back sur scène. Par ailleurs, cette nouvelle jeunesse se montre politiquement très conformiste.

Se détachent cependant de ce paysage quelque peu monotone des artistes prometteurs comme Françoise Hardy (née en 1944) et Jacques Dutronc (né en 1943).

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Classification

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Médias

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Le chanteur et acteur français Maurice Chevalier (1888-1972) fut une vedette à Hollywood où il a…

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Jeanne Bourgeois dite Mistinguett (1875-1956), aux Folies-Bergère, en 1920. Vedette française de…

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Joséphine Baker (1906-1975) est arrivée à Paris avec une troupe américaine qui présentait la Revue…

Autres références

  • ARRANGEURS DE LA CHANSON FRANÇAISE

    • Écrit par Serge ELHAÏK
    • 7 930 mots
    • 3 médias

    Si une chanson est au départ une subtile union de paroles écrites par un auteur et d’un air créé par un compositeur, c’est grâce à un accompagnement musical approprié, fruit du travail d’un arrangeur, qu’elle prend toute sa valeur auprès de son interprète.

    Arrangeurs ! Ce mot étonnant...

  • AZNAVOUR CHARLES (1924-2018)

    • Écrit par Alain POULANGES
    • 1 586 mots
    • 1 média

    Maurice Chevalier a dit de lui : « Il a osé chanter l'amour comme on le ressent, comme on le fait, comme on le souffre. » Pourtant le chemin fut long et difficile et, avant de connaître une gloire internationale, Charles Aznavour a bien failli subir l'échec définitif magnifiquement décrit dans « Je...

  • BÉART GUY (1930-2015)

    • Écrit par Hélène HAZERA
    • 1 080 mots
    • 1 média

    Guy Béart est né le 16 juillet 1930 au Caire dans une famille juive égyptienne francophone. Son père, homme d’affaires, se déplace beaucoup. Le jeune Guy Béart va donc passer son enfance entre la Grèce, le Mexique et le Liban, où la famille se fixe en 1940. Il obtient son baccalauréat à Beyrouth, puis...

  • BÉCAUD GILBERT (1927-2001)

    • Écrit par Michel P. SCHMITT
    • 822 mots

    Né à Toulon en 1927, François Silly a choisi le pseudonyme Bécaud (nom du deuxième époux de sa mère) vers vingt-cinq ans, à son retour des États-Unis. Un prénom étroitement hexagonal et un nom qui en américain signifie « stupide » se devaient d'être remplacés par le second prénom du chanteur, et un...

  • BÉRANGER FRANÇOIS (1937-2003)

    • Écrit par Universalis
    • 150 mots

    Chanteur libertaire français. Arrêtant ses études, François Béranger est brièvement ouvrier chez Renault, comme son père à l'origine, puis comédien itinérant dans la troupe de La Roulotte avant de vivre comme un traumatisme son service militaire en Algérie. C'est Mai-68 qui le fait éclore. Il signe...

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