BIOLOGIE Les pratiques interventionnelles

Intervenir au niveau cellulaire et tissulaire

Le niveau cellulaire et tissulaire représente un domaine où l'ingénierie biologique a, de longue date, été mise en œuvre. C'est par exemple celui de l'embryologie expérimentale. Là, toutes sortes d'opérations visant à inverser la polarité du développement de l'œuf ont été tentées. De multiples expériences d'implantation, de transfert ou d'inversion tissulaire ont été effectuées dans l'embryon. Des chimères ont été créées, notamment chez l'oiseau, pour préciser l'origine cellulaire des divers tissus (N. Le Douarin).

À une autre échelle, il est vrai, chez les grands animaux d'élevage en premier lieu, puis chez l'homme, les avancées en biologie cellulaire ont rendu possibles maintes interventions concernant la reproduction sexuée. D'une manière générale, la procréation médicalement assistée (P.M.A.), permettant de pallier divers types de stérilité, a illustré une nouvelle forme de biologie que l'on pourrait encore qualifier d'interventionnelle. Pourtant, là aussi, les cellules gamétiques mises en œuvre sont normales et la gestation après fécondation in vitro n'enfreint pas les processus physiologiques normaux. En revanche, ce qui est apparu comme l'exemple type d'un premier franchissement des limites naturelles fut le clonage animal. L'imagination se trouva frappée par ce qui apparaissait comme une infraction au processus naturel de reproduction gamétique. Le mythe d'une biologie désireuse de rompre avec l'un des mécanismes les plus ancrés dans l'évolution refit alors surface. Briggs et King, puis John Gurdon avaient certes déjà établi dans les années 1950 que le transfert d'un noyau somatique dans l'ovocyte énucléé d'un amphibien, le xénope, permettait la reconstitution d'un animal adulte ; mais les premières tentatives visant à reproduire cette expérience sur des mammifères s'étaient avérées infructueuses. La naissance de la brebis Dolly en 1996, suite aux travaux de l'équipe écossaise dirigée par Ian Wilmut, après 277 essais de transfert nucléaire dans des ovules énucléés, constitua une étape capitale. Elle apporta en effet la preuve que le noyau d'une cellule somatique de mammifère (en l'occurrence une cellule de glande mammaire) est, lui aussi reprogrammable ! D'autres mammifères ont depuis lors été « clonés » à la faveur d'essais inspirés du même principe.

Xénope du Cap

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Ian Wilmut et la brebis Dolly

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La naissance, en 1996, du premier mammifère cloné, la brebis Dolly, a marqué une étape importante…

S'est inévitablement posée la question du clonage humain, démarche universellement condamnée au nom de l'éthique, et qui, à l'exception des dires (pour le moins invraisemblables) de la secte rahélienne, n'a probablement, et fort heureusement, jamais été réalisé. Pour autant, le problème et les débats allaient resurgir sous une autre forme à travers les nouvelles possibilités offertes par l'utilisation des cellules souches embryonnaires humaines.

Cellules souches, thérapie cellulaire

L'existence au sein de tissus adultes de cellules souches capables de régénérer ces tissus, soit de façon régulière – comme c'est le cas pour les cellules souches hématopoïétiques présentes dans la moelle osseuse ou pour l'épithélium intestinal – soit à la suite de lésions ou traumatismes (épiderme, muscles) est connue ou soupçonnée de longue date. Le public est, d'une certaine manière, familiarisé avec les progrès de l'ingénierie cellulaire qui ont permis de nombreuses greffes de moelle osseuse (par exemple dans le traitement des leucémies) ou la pose de greffons cutanés chez les grands brûlés.

Plusieurs découvertes, qui ne peuvent être que résumées ici, allaient permettre de jeter un regard nouveau sur les cellules souches et déboucher sur le concept général de thérapie cellulaire. Pour ne citer[...]

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Écrit par

  • François GROS : professeur honoraire au Collège de France, membre de l'Institut

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Pour citer cet article

François GROS, « BIOLOGIE - Les pratiques interventionnelles », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

Médias

Ian Wilmut et la brebis Dolly

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Sang de cordon ombilical

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Autres références

  • AÉROBIOSE & ANAÉROBIOSE

    • Écrit par Claude LIORET
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    L' aérobiose est la vie en présence d'air, l'anaérobiose est la vie en absence d'air. En fait, c'est la présence ou l'absence d'oxygène qui importe : certains organismes, dits aérobies stricts, ne peuvent vivre qu'en présence d'oxygène ; d'autres, dits anaérobies[...]

  • ADAPTATION - Adaptation biologique

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    En biologie comme en technologie, le concept d'adaptation sert généralement à comprendre la relation qui existe entre les structures et les fonctions qu'elles remplissent. Dire d'un organe ou d'un outil qu'il est bien adapté signifie qu'il est efficace, autrement dit que les caractères de l'objet[...]

  • ANIMAUX MODÈLES, biologie

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    C'est de l'art que vient le mot « modèle », à l'origine figure destinée à être reproduite. Ce sens se retrouve en biologie, par exemple dans le choix de l'animal ou du paysage reproduit par le dessinateur ou le photographe. Cependant, de nombreux sens dérivés se sont construits[...]

  • ANIMAUX MODES D'ALIMENTATION DES

    • Écrit par René LAFONT, Martine MAÏBECHE
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    La diversité des modalités alimentaires que l'on rencontre chez les animaux est bien illustrée par la coexistence de deux terminologies parallèles, l'une latine (-vore de vorare) et l'autre grecque (-phage, de phagein), qui définissent leurs comportements alimentaires. Un troisième[...]

  • ANIMAUX MODES DE REPRODUCTION DES

    • Écrit par Catherine ZILLER
    • 24 451 mots
    • 4 médias

    Tout être vivant tend à se conserver en tant qu'individu et à se perpétuer en tant que membre d'une espèce. Ces deux tendances reposent l'une et l'autre sur une faculté fondamentale de la matière vivante, la faculté de se reproduire. La reproduction a pu être définie par Buffon (1748) comme[...]

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Voir aussi