AUTISME
En 1943, un pédopsychiatre américain, Leo Kanner (1894-1981), empruntait au Suisse Eugen Bleuler le terme « autisme », jusque-là réservé à un des symptômes de la schizophrénie, pour en différencier ce qu'il appelait « un trouble inné du contact affectif » apparu souvent dès la naissance ou, au moins, avant trois ans, d'où son appellation exacte d'autisme infantile précoce. Ce trouble s'exprime cliniquement par trois ordres de symptômes : des troubles de la communication, des troubles de la socialisation et un mode particulier de relation aux objets humains et non humains, marqué par des stéréotypies, des intérêts restreints et un fort besoin d'imposer à l'environnement un caractère immuable. Sa définition, reste strictement comportementale et repose sur une convention internationale. Il n'existe, en effet, aucune corrélation biologique, aucun test sanguin, aucun enregistrement, aucune image du cerveau, qui permettent d'affirmer ou d'infirmer l'existence d'une évolution autistique. Récemment, l'autisme est devenu un véritable phénomène de société, donnant lieu à des polémiques très médiatisées et parfois violentes, comme si l'autisme était contagieux et entraînait entre les praticiens, les chercheurs et les familles concernées une véritable pathologie de la communication. On essaiera ici de garder une approche aussi objective et dépassionnée que possible.
Description clinique
Troubles de la communication
La communication non verbale est perturbée, souvent dès la naissance. L'enfant, qui a pu inquiéter ses parents, dans les premiers mois de sa vie, en ne réagissant pas lorsqu'on s'approchait de lui pour le prendre dans les bras, en restant mou (« comme un sac de pommes de terre », disait Kanner) ou, au contraire, hypertonique, en ne regardant pas le visage de sa mère, en ne souriant pas, tarde à désigner un objet pour attirer l'attention d'un tiers. Il exprime peu ou à contretemps ses émotions et a des difficultés à décrypter les émotions des autres sur leurs mimiques.
Plus tard, le langage peut être absent ou, s'il existe, se limiter à quelques mots répétés, sans valeur de communication. Quand il se développe davantage, il reste modifié, à la fois dans sa musique et dans sa structure. La voix est mécanique, sans nuances. Le sujet de la phrase est longtemps absent avec souvent une inversion pronominale. Même quand la syntaxe devient normale, le langage garde un caractère concret, avec peu de métaphores, des substantifs ou des verbes pris dans leur sens premier, et le locuteur autiste manifeste souvent son incompréhension devant des homonymies et des jeux de mots. Englué parfois dans des phrases répétitives, reprises de l'entourage ou empruntées à des dessins animés ou à des clips publicitaires, répondant souvent en écho et prenant rarement l'initiative d'une demande, il peut produire des néologismes ou des déformations, qui donnent à sa parole les caractères d'un idiome personnel, parfois difficile à comprendre.
Troubles de la socialisation
L'enfant s'isole, ne prend pas l'initiative d'un échange, ne répond pas aux sollicitations, redoute le contact physique ou la simple adresse vocale, fuit l'échange visuel. Ne cherchant pas spontanément de réconfort, lorsqu'il est dans une situation personnelle de détresse, il semble indifférent à l'expression par un autre d'un malaise quelconque et interagit socialement de manière souvent maladroite et inadaptée, comme s'il peinait à comprendre ce que son interlocuteur attend de lui et à se représenter les pensées et les sentiments d'autrui. Il est plus à l'aise avec les choses inanimées qu'avec les gens. Cette extrême solitude (aloneness, dans l'article original de Kanner) retentit sur ses jeux. L'enfant ne s'intéresse[...]
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Écrit par
- Jacques HOCHMANN : professeur émérite à l'université Claude-Bernard, médecin honoraire des hôpitaux de Lyon
. In Encyclopædia Universalis []. Disponible sur : (consulté le )
Média
Autres références
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AUTISME (PRISE EN CHARGE DE L')
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Insaisissable, déconcertant. Toujours ailleurs que là où on croit le situer. S'employant au demeurant lui-même, assidûment, à brouiller les pistes. Suscitant par dizaines des disciples, voire des imitateurs, lors même qu'il singularise ses entreprises, ses « tentatives », et cherche à les soustraire...
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Psychanalyste américaine d'origine autrichienne, Margaret Mahler compte parmi les plus grands théoriciens du développement du très jeune enfant. Née à Sopron (actuellement en Hongrie), elle s'installa comme pédiatre à Vienne, où elle poursuivit son analyse avec Helen Deutsch...
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...effet, si on arrête le renforcement, le comportement va progressivement disparaître. Ce type de programme peut être employé auprès d’enfants souffrant d’un trouble envahissant du développement (TED), les parents ou l’équipe soignante ayant pour mission de renforcer positivement l’enfant à chaque émission du... - Afficher les 9 références
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