NUMÉRIQUE ANALYSE

Accélérations de convergence

Problématique

On suppose donnée une forme linéaire continue L sur un espace vectoriel normé de fonctions E et un processus linéaire d'interpolation (L n ) de L. Pour tout élément f de E, la suite numérique a n  = L n (f ) converge ou non vers a = L(f ) ; il peut arriver que la suite (a n ) diverge, ou encore qu'elle converge vers a, mais trop lentement pour être utilisable en analyse numérique.

Voici deux exemples très élémentaires mais fondamentaux d'une telle situation.

Sommes de séries. Ici E est l'espace vectoriel l1(C) des suites sommables muni de la norme N1. L'application qui à u = (u p ) associe

est une forme linéaire continue qu'on approche par les sommes partielles S n (u) = s n  ; ici le processus d'approximation est stable, puisque ∥S n ∥ = 1. La qualité de l'approximation de S(u) est mesurée par le reste r n  = (S − S n )(u).

L'exemple classique des séries de Riemann

montre que la convergence peut être lente puisque alors :
lorsque α = 2, il faudrait prendre 1010 termes pour obtenir la précision 10−10.

Dans d'autres cas, les sommes partielles divergent vers + ∞ mais, par un développement asymptotique, on se ramène à l'étude d'une suite convergente. L'exemple de la série harmonique :

est frappant :
on cherche alors à approcher la constante d'Euler :
Intégrales. Ici E = C(]a, b]) est l'espace vectoriel des fonctions continues sur]a, b]à valeurs complexes muni de la norme N. L'application qui à un élément f associe :
est une forme linéaire continue qu'on peut approcher par un processus interpolatoire (I n ). Dans la méthode des rectangles, ou des trapèzes, on a ∥I n ∥ = 1, et le processus est donc stable, mais la rapidité de convergence est médiocre, de l'ordre de 1/n pour les rectangles et de 1/n 2 pour les trapèzes.

Pour améliorer la performance, on peut soit changer complètement d'algorithme d'approximation – pour les intégrales, on peut, par exemple, recourir à des méthodes gaussiennes –, soit garder le même algorithme de base (L n ) mais améliorer sa rapidité de convergence par des transformations purement algébriques portant sur la suite (L n (f )) ; on dit alors qu'on effectue une accélération de convergence. Dans la suite, nous décrirons deux exemples significatifs de telles méthodes d'accélération : la première, de portée très générale, s'appelle méthode d'extrapolation à la limite ; elle utilise des barycentrations. La seconde, due à Euler, s'applique aux séries alternées et, plus généralement, aux séries trigonométriques.

Méthode d'extrapolation à la limite

La méthode d'extrapolation à la limite consiste à utiliser une évaluation asymptotique de la différence L n (f ) − L(f ). Pour des commodités d'écriture, on utilisera pour les suites la notation fonctionnelle a(n) = L n (f ) et a = L(f ).

Principe

Plaçons-nous d'abord dans l'hypothèse simple où l'on a établi que :

avec |k′| < |k| < 1 et λ ∈ C.

Trois cas peuvent se présenter :

I. On connaît explicitement k et λ. Pour accélérer la convergence, il suffit évidemment de corriger la suite (a(n)) en posant :

II. On connaît explicitement le nombre k mais pas le coefficient λ. On effectue alors une barycentration de a(n) et a(n + 1) de manière à éliminer le terme inconnu λk n  ; on écrit :

d'où :
ce qui conduit à poser :
dans ces conditions, on a

III. On connaît seulement l'existence de k et λ sans connaître leur valeur explicite. On se ramène alors au cas (II) en remplaçant k par une valeur approchée ; on observe que :

On pose alors :

dans ces conditions,

Cette méthode s'applique[...]

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Écrit par

  • Jean-Louis OVAERT : agrégé de l'Université, ancien élève de l'École normale supérieure, professeur de mathématiques spéciales
  • Jean-Luc VERLEY : maître de conférences honoraire à l'université de Paris-VII

Classification

Pour citer cet article

Jean-Louis OVAERT, Jean-Luc VERLEY, « NUMÉRIQUE ANALYSE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

Autres références

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